Opticien et fabricant d’appareils photo et de verres optiques, Cosina est à l’origine de nombreux produits OEM, fabriqués pour d’autres marques plus renommées (Canon, Yashica, Nikon, Olympus, Konica, Vivitar, Epson, Rollei et Zeiss). Après avoir acheté les droits pour estampiller plusieurs appareils télémétriques et leurs objectifs assortis du label prestigieux Voigtländer, Cosina continue à utiliser ce dernier pour la série d’objectifs SL/SL 2 pour appareils reflex. Fabriqués en nombre limité, les premiers modèles n’ont connu qu’une distribution à compte-gouttes à l’extérieur du Japon. La série comporte actuellement trois objectifs (Color Skopar 20 mm f3,5, Ultron 40 mm f2 et Nokton 58 mm f1,4 pour appareils Nikon, Pentax et Canon, un quatrième est annoncé pour bientôt.
Les objectifs de cette série n’ont rien à envier à d’autres objectifs haut de gamme : réalisés en partant de nobles matériaux et soigneusement assemblés, certains offrent même une luminosité plus qu’honorable. Récemment, j’ai eu le plaisir de tester deux objectifs en monture Canon EF, dont le Voigtländer Ultron 40 mm f2 SL. Celui-ci fait, par son faible encombrement, partie de la famille d’objectifs “pancake”. Il ne mesure que 25 mm et ne pèse que 200g, ce qui relève de l’exploit, car il est presque entièrement en métal, du pare-soleil à la monture à baïonnette, en passant par le fut de l’optique. La monture EF comporte par ailleurs sept contacts pour transmettre aux appareils Canon l’essentiel des caractéristiques de l’optique(focale, ouverture et distance de mise au point), vous bénéficierez ainsi de tous les modes d’exposition et modes de mesure.
Grâce aux contacts éléctriques, l’appareil propose une confirmation de la mise au point, via un témoin lumineux situé dans le viseur. Si la bague de distance dispose d’une translation précise pour une mise au point correcte, l’emploi d’un verre de visée à stigmomètre ou de la fonction Live View s’impose parfois pour obtenir une netteté critique dans des conditions de prise de vue moins favorables.
Fruit de ses dimensions réduites, l’Ultron se contente d’un diamètre de 52 mm pour les filtres – c’est une bonne nouvelle pour les aficionados de filtres de protection ou de filtres polarisants, encore peu onéreux dans ce diamètre. Qui plus est, la monture avant ne tourne pas pendant la mise au point, facilitant ainsi la manipulation d’un filtre polarisant.
Par sa focale de 40 mm – qui rappelle certains objectifs pour appareils télémétriques, tel le Summicron-C ou Minolta Rokkor 40mm f/2 des Leica CL et Minolta CLE ou encore le Sonnar T 40 mm f/2.8 du Rollei 35 SE- l’objectif se situe à mi-chemin entre les objectifs grand-angle et les objectifs “standard”. Sa focale correspond peu ou prou à la diagonale du format 24×36 mm (43 mm) et l’Ultron restitue ainsi la vision humaine lorsqu’il est adapté sur un appareil “plein format”. Il s’agit alors d’un objectif idéal pour le voyage, le reportage et la photo de rue.
Utilisé sur un appareil à capteur APS-C, l’objectif perd en revanche un peu de son intérêt, son angle de champ se rapproche alors de celui d’un objectif de 64 mm. A savoir aussi que la mise au point devient plutôt délicate avec un tel appareil. Il faut donc souvent faire confiance au témoin de mise au point de l’appareil…
Bien qu’il ne s’agisse pas d’un objectif “standard” à proprement parler, je n’ai pas pu m’empêcher à comparer l’Ultron avec deux objectifs de ce type, un Canon EF 50 mm f 1.4 USM et un Canon EF 50 mm f 1.8 II. L’objectif à mise au point manuelle brille alors par sa finition et sa robustesse manifeste, reléguant les objectifs Canon au second plan. Quid de la qualité optique, primordiale lorsqu’on investit dans un tel bijou plus onéreux et moins polyvalent que les objectifs évoqués plus haut ? En un seul mot : impressionnant !
Les deux objectifs Canon offrent dès la pleine ouverture un piqué très honorable au centre (sous condition d’assister la mise au point manuellement en mode Live View…), mais les bords restent désespérément doux et ne rejoignent le centre de l’image qu’à partir de f/5, 6.
Le Cosina/Voigtländer est nettement plus homogène. Dès la pleine ouverture, il est parfaitement utilisable, grâce à un très bon piqué dans le centre et dans la périphérie de l’image. Seule ombre au tableau : l’objectif testé révèle une zone intermédiaire dans laquelle les petits détails restent moins bien définis à f/2 et f/2.8. En fermant le diaphragme à f/4, l’objectif produit des images homogènes partout, très bien définies et bien contrastées, et ce, jusqu’à f/16. Le manque d’homogénéité mentionné n’affecte pas les images prises avec un appareil à capteur APS-C. La zone incriminée se situe tout juste à l’extérieur du cadre imposé par le capteur et les images sont donc détaillées partout et dès la pleine ouverture. L’Ultron ne faiblit pas lorsqu’il est associé à un EOS 5 D Mark 2, dont le capteur est très exigeant. C’est seulement avec la bonnette macro livrée, que les performances optiques baissent d’un cran, surtout sur les bords.
Bien que certains tests « plus techniques » lui attestent une distorsion en barillet, peu prononcée, à aucun moment j’étais tenté d’utiliser un outil dédié (PT Lens, Bibble 5) pour la corriger. Quant au vignetage, présent à pleine ouverture, il s’estompe progressivement en fermant le diaphragme et il devient invisible dès f/5,6. L’aberration chromatique est le seul défaut nécessitant une correction par voie logicielle. Mais elle se situe ici entre celle du Canon EF 17-40 mm f 4 L à 40 mm, bien plus importante, et celle du Canon EF 50 mm f 1,4, plus discrète.
Le rendu des parties hors profondeur du champ (bokeh) des images est une des caractéristiques les plus importantes d’une optique de qualité, mais elle est également la plus difficile à évaluer. A croire certains sites de partage de photos, il existe même de nombreux photographes n’utilisant leurs objectifs qu‘à pleine ouverture pour optimiser ledit rendu. Pour ma part, je considère qu’il faut utiliser toute la plage des diaphragmes (sauf peut-être les ouvertures les plus modestes, à cause de la diffraction…) en fonction du sujet et des conditions de prise de vue. Équipé d’un diaphragme presque circulaire qui devrait produire un rendu agréable des zones floues, le “bokeh” de l’Ultron se situe à mi-chemin entre celui du Canon 50 mm f 1.4 (plus moelleux) et celui du Canon 50 mm f 1.8 (plus dur).
Belle finition, excellente qualité optique et faible encombrement, cet objectif a vraiment tout pour plaire. Il produit en toutes circonstances des images bien définies et contrastées. D’une conception inédite, le pare-soleil est plutôt efficace et il sert aussi comme bague adaptatrice pour accueillir la bonnette macro fournie.
Mais il reste certains points à améliorer. D’abord, l’objectif aurait besoin d’un repère de montage saillant — son adaptation n’est pas toujours simple, surtout lorsqu’on porte des gants ou lorsque la lumière fait faux bond. Ensuite, j’aurais préféré un autre revêtement pour la bague de mise au point — les petites rainures de cette dernière aspirent littéralement les poussières et petites saletés et le nettoyage n’est de ce fait pas toujours chose aisée. Enfin, l’Ultron mériterait un bouchon arrière mieux conçu — celui livré avec mon objectif de prêt se bloquait parfois intempestivement sur la monture. Mises à part ces quelques remarques, je le conseille à tous ceux à la recherche d’une optique légère, discrète et maniable pour la photo de voyage ou la randonnée. Reste à évoquer son prix qui est, bien que “raisonnable”, à la hauteur de ses nombreuses qualités…
Focale : 40 mm (équivalent 64 mm sur un reflex au format APS-C)
Ouverture maximale/minimale : f/2 et f/22
Construction optique : 6 éléments en 5 groupes, une lentille asphérique, diaphragme circulaire à 9 lamelles
Angle de champ : 57 °
Distance minimale de mise au point : 0.38 m
Diamètre de fixation pour filtre : 52 mm
Diamètre x longueur : 63 mm x 25 mm
Poids : 200 g
Livré avec pare-soleil et bonnette macro
Prix : 409 euros
Nous remercions Jean-Christophe Courte du site Urbanbike.com et surtout Richard Frances du site Lapetiteboutiquephoto.com qui nous a permis d’essayer l’objectif pendant une période de prêt suffisamment longue.